Au risque de leur vie, ces héros font fonctionner l’hôpital de Fataki !
L’est de la RD du Congo souffre de tensions et de conflits depuis des décennies. Quelque 120 groupes armés y sont actifs. Les causes de la violence y sont complexes : il y a notamment, des tensions toujours plus fortes entre éleveurs et agriculteurs (groupes ethniques Hema et Lendu). En effet, les milices s’y battent pour le contrôle des mines d’or et de cobalt dans la région. La violence s’est encore intensifiée en 2019, lorsque l’armée a lancé une offensive contre la CODECO et d’autres milices en Ituri. Depuis mars, plus de 200 000 personnes ont fui, selon les chiffres du Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR). La plupart des réfugiés sont des femmes et des enfants.
Ce conflit sanglant a été oublié. Les médias et les responsables politiques concentrent leur attention sur d’autres foyers de tension dans le monde. Dans cette série d’articles, nous mettons en lumière les divers problèmes auxquels la région est confrontée, nous montrons comment Memisa essaie de contribuer à une solution et nous laissons les gens eux-mêmes s’exprimer. De cette façon, nous essayons de donner aux habitants de l’est du Congo l’attention qu’ils méritent.
Partie 1 : Rencontre avec le personnel infirmier qui – au péril de sa vie – fait fonctionner l’hôpital de Fataki
Jean Marie, Déogratias, Paula, Jean Claude, Innocent, Joséphine sont les infirmières et infirmiers de l’hôpital de Fataki qui ont choisi de rester à leur poste de travail alors qu’une nouvelle vague des violences a saisi les lieux depuis fin 2017.
Innocent et Jean Claude n’ont que 25 ans, ils sont nés pendant la guerre, ils ne connaissent finalement que la guerre. Paula a vu avec espoir le pays devenir indépendant puis l’as vu chuter petit à petit dans une guerre pluri-décennale qui a mis à genoux la région de l’Ituri, entre autres.
Quand nous leur demandons pourquoi ils ont choisi de rester à leur poste même au péril de leur vie, la réponse est unanime : « Nous ne pouvons pas abandonner les malades ». Jean Marie ajoute : « Nous avons prêté serment ».
La peur
Elles et ils ne prennent pas position pour les uns ou pour les autres, l’atrocité de cette guerre fait oublier qui sont les « bons » et les « méchants ». Les revendications ethniques, les intérêts économiques, …. Tous ces éléments se mélangent sans solution durable depuis désormais 40 ans. Les groupes armés se multiplient et le nombre de victimes ne cesse d’augmenter. Les populations se déplacent par milliers voire par millions pour sauver leur vie : les enfants sont enrôlés et le viol devient une arme de guerre. Les ressources du pays sont un butin trop attrayant pour faire taire les armes…
Les infirmiers et infirmières de Fataki nous racontent que depuis 2018 les tueries dans les environnants ont repris et la peur a refait surface. « Notre famille est particulièrement inquiète », nous rapporte Innocent.
Pression au travail
« Travailler dans un tel contexte n’est pas du tout facile. La guerre signifie devoir affronter des épreuves inimaginables comme le déplacement, la séparation avec les proches, les pillages et le risque d’être blessés ou tués », nous raconte Joséphine.
De plus, les patients, ayant moins de revenus, ne paient pas leurs soins. L’hôpital n’a presque plus de rentrées financières et le personnel est mal payé. La plupart des prestataires sont partis pour rejoindre des lieux plus sûrs ou pour se rapprocher de leur famille, ce qui engendre une surcharge de travail pour ceux qui ont décidé de rester.
Une rénovation bienvenue
Memisa appuie l’hôpital de Fataki de manière structurelle depuis 1996. Chaque année nous fournissons médicaments et équipements, nous organisons des formations pour le personnel et soutenons son fonctionnement quotidien par l’achat et l’entretien d’ambulances. Une grosse réhabilitation de l’hôpital (dont certains services présentaient un état de délabrement avancé) a commencé en 2019 et continuera en 2020.
C’est grâce à la résilience et la résistance de Jean Marie, Déogratias, Paula, Jean Claude, Innocent, Joséphine et de tous les autres prestataires que les patients peuvent être soignés et que Memisa peut continuer à faire son travail.