Les personnes vulnérables ne doivent pas sortir plus vulnérables de cette crise du coronavirus
Depuis sa création, Memisa lutte pour un accès aux soins de santé pour les plus vulnérables. Parce que l’accès aux soins de santé est un droit humain essentiel. Cette phrase, nous l’avons déjà écrite et récitée à l’infini. Elle est aussi la plus souvent utilisée quand nous expliquons ce que représente Memisa. En tant qu’ONG médicale de coopération au développement, nous considérons qu’il est normal de faire preuve de solidarité envers les communautés moins fortunées. Solidarité, personnes vulnérables,… des mots clés de la coopération au développement, mais qui sont très vite devenus plus concrets et plus proches de nos quotidiens la semaine dernière. La crise du coronavirus nous fait prendre conscience de l’importance d’une bonne santé et de l’accès aux soins de santé. Chaque jour, nous sommes assaillis de chiffres alarmants sur le nombre de personnes infectées, sur la façon dont nos hôpitaux et leur personnel travaillent d’arrache-pied pour garder la tête hors de l’eau et sur les mesures que nous devons prendre pour nous protéger et protéger nos proches. En parallèle, nous entendons ou lisons chaque jour des informations sur les groupes de personnes qui risquent de sombrer suite aux mesures prises par le gouvernement. Rester chez soi est facile pour ceux qui disposent d’un logement sûr, de ressources et d’un réseau. Cela l’est beaucoup moins pour ceux qui n’ont pas cette chance.
Par exemple, l’Office des étrangers n’a enregistré aucune nouvelle demande d’asile depuis lundi. Il n’y a donc pas d’accueil pour les nouveaux demandeurs d’asile. Ces personnes, parmi lesquelles se trouvent des malades, des personnes âgées, des enfants et des femmes enceintes, se retrouvent donc à la rue. Au même titre que 11.11.11 et Vluchtelingenwerk Vlaanderen, nous trouvons peu remarquable que notre gouvernement abandonne les personnes vulnérables comme les sans-abri et les demandeurs d’asile en période d’incertitude, mais appelle la population à faire preuve de solidarité.
Mardi, ce sont les experts en éducation qui ont tiré la sonnette d’alarme. L’apprentissage à distance est moins évident pour les enfants issus de milieux défavorisés. En ne fréquentant pas l’école pendant des semaines, ils courent un risque accru de difficultés en matière d’apprentissage. Parce que les moyens financiers manquent, les parents doivent se demander chaque jour comment subvenir aux besoins de la famille. Ils n’ont donc pas l’espace (mental) ni le temps de stimuler et d’aider leurs enfants dans leurs travaux scolaires. Il est également possible qu’il n’y ait qu’un seul ordinateur portable pour une famille avec plusieurs enfants.
Le lendemain, la police, le ministère public et les travailleurs sociaux ont mis en garde contre une augmentation des violences domestiques. Les écoles et les garderies sont fermées et une grande partie de la population ne travaille plus. « Vivre constamment les uns sur les autres peut causer des tensions croissantes, en particulier dans les familles vulnérables. » Outre le fait que tout le monde est constamment à la maison, pour certains, la quarantaine élimine également le contrôle social et un « lieu d’évasion » sûr. En Espagne, les femmes victimes de violences (sexuelles) peuvent alerter les pharmacies de leur quartier en demandant un « masque-19 ». Une idée à introduire en Belgique aussi ?
Jeudi, en raison de la ruée de certains Belges dans les supermarchés, les stocks avaient fortement diminué, pouvant causer des problèmes aux banques alimentaires de notre pays. Vendredi, le comité des droits de l’enfant indiquait avoir reçu des plaintes de parents dont les enfants sont placés dans des centres de soins spéciaux pour jeunes et pour lesquels les visites le week-end ont été supprimées. Une mesure compréhensible dans le contexte de la santé publique générale, mais qui est particulièrement difficile pour les parents et les enfants en question.
Il est logique que les mesures de sécurité pour contenir cette épidémie soient respectées. Il est compréhensible que chacun se préoccupe avant tout de sa famille et de ses amis. Mais préoccupons-nous aussi de tous ces groupes mentionnés ci-dessus. De ces personnes en mauvaise santé ou qui n’ont pas de réseau sur lequel s’appuyer. Pour que les personnes qui étaient déjà vulnérables ne sortent pas de cette crise du coronavirus encore plus vulnérables.
Annelies Van Erp, Memisa