Aissata de Mauritanie : « Sage-femme est l’un des plus beaux métiers. »
En Mauritanie, un nouveau projet financé par l’Union européenne et mis en œuvre par Enabel a été lancé en 2019. Avec notre partenaire local, l’Association pour la Promotion de la Santé Dar Naïm (APSDN), Memisa s’occupe du volet santé. L’objectif général de ce projet est d’améliorer la qualité des soins de santé dans les centres de santé par le biais de formations.
Avec 20 ans d’expérience, la sage-femme Aissata Gaye est le noyau dur du centre de santé de Dar Naïm, une banlieue de la capitale Nouakchott. Chaque jour, il y a de nombreuses consultations au programme. Avec une autre collègue, elle est responsable des échographies. « Un accouchement me donne toujours autant d’énergie. Il est toujours gratifiant de voir à quel point mes patients me sont reconnaissants. Il y a d’ailleurs une vingtaine de filles dans le quartier qui portent mon nom… », dit-elle en riant.
S’exercer, s’exercer et toujours s’exercer
Aissata a suivi un stage en Belgique à l’hôpital Jessa de Hasselt où elle a perfectionné ses connaissances en travaillant avec des mannequins. Il s’agit de mannequins innovants qui servent à simuler la naissance et la réanimation des nouveau-nés. Grâce à cette formation, Aissata pourra transmettra les connaissances acquises à ses collègues qui, à leur tour, formeront d’autres professionnels de la santé. « Ces formations sont incroyablement importantes« , dit-elle avec détermination, « parce qu’à l’heure actuelle, beaucoup de travailleurs de la santé qui obtiennent leur diplôme n’ont pas le bagage nécessaire pour commencer à travailler. Ils n’ont que des connaissances théoriques, mais aucune expérience pratique. Il n’y a pratiquement pas de stages et de plus, il manque un cadre solide. Que vous soyez infirmier, infirmière, médecin ou sage-femme, vous ne pouvez pas vous permettre de faire des erreurs. Une petite erreur peut avoir d’énormes conséquences ».
Respect de la vie privée et secret professionnel
C’est la première fois qu’Aissata vient en Belgique. « C’est très enrichissant pour moi de voir ce qu’est une maternité belge. Je trouve remarquables les différents compartiments dans lesquels les consultations ont lieu. C’est une bonne chose. Ils donnent aux femmes plus d’intimité et facilitent le maintien du secret professionnel ».
Une autre grande différence est la facilité avec laquelle les patients en Belgique se rendent chez le médecin ou à l’hôpital. « En Mauritanie, les femmes n’ont pas toujours le réflexe de se rendre en consultation si elles n’ont pas leurs règles ou si les premiers signes de grossesse apparaissent. C’est pourquoi Memisa, en collaboration avec l’APSDN, s’engage fortement dans la sensibilisation. Cela se passe aussi bien dans les centres de santé que lors de visites à domicile. »
Une histoire de Famille
Selon Aissata, beaucoup de progrès ont été réalisés en vingt ans, mais son travail reste parfois difficile sur le plan émotionnel. « La fille d’un collègue est venue au centre de santé à la fin de sa grossesse. Des complications sont survenues et elle a perdu son bébé. Les choses se sont rapidement dégradées avec la maman aussi. Elle continuait à saigner, alors je l’ai accompagnée à l’hôpital. Entre-temps, le soir était tombé et la plupart des membres du personnel de l’hôpital étaient déjà rentrés chez eux. Nous avons dû attendre une heure et demie avant qu’un médecin soit présent. Pour ne rien arranger, la banque de sang était vide… L’ambulancier a été envoyé pour collecter du sang, mais cela a pris beaucoup de temps. Elle est morte avant qu’il ne revienne… » Quatre ans plus tard, Aissata raconte toujours cette histoire d’une voix tremblante.
« Heureusement, pour chaque événement triste, je peux raconter au moins deux fois plus d’histoires positives. Celles des patients que nous avons pu aider », conclut-elle. « Notre association (APSDN) est un peu comme une famille : nous sommes là les uns pour les autres lors d’événements difficiles, mais en même temps nous partageons les moments heureux de la vie. »