À quoi sert un hôpital moderne si les patients ne peuvent pas payer les soins ?

13 / 01 / 2022

« Les autotests sont un moyen rapide et abordable… ». Voici ce qu’a déclaré le Premier ministre Alexander De Croo lors d’une conférence de presse. Abordable, c’est bien sûr relatif ! 8 euros par test, une somme négligeable pour certains, mais conséquente pour d’autres.

Cependant, nous pouvons convenir qu’en Belgique, nous sommes bien couverts pour toutes sortes de frais médicaux. Par exemple, un test PCR est gratuit pour une personne qui présente des symptômes du COVID-19 ou qui a eu un contact à haut risque. En dehors de la COVID-19, les frais médicaux élevés ne conduisent pas forcément à une perte de revenus ou à une situation de pauvreté. En Belgique, il est d’ailleurs obligatoire de s’affilier à une caisse d’assurance maladie reconnue. Si vous ne souhaitez pas le faire, vous pouvez vous affilier gratuitement à la « Caisse Auxiliaire d’Assurance Maladie -Invalidité ».

Une assurance maladie est importante pour garantir à la population un accès aux soins de santé. La pandémie de coronavirus a mis en évidence plusieurs problèmes, dont le suivant : près de 40 % de la population mondiale n’a aucune forme d’assurance maladie ou d’accès aux soins de santé publics. Selon la Banque mondiale, en Afrique subsaharienne, ce chiffre atteint plus de la moitié de la population.

Bloquées à l’hôpital

En tant qu’ONG médicale, Memisa est fortement engagée dans l’amélioration de la qualité des soins de santé dans cinq pays africains et en Inde. Avec les partenaires locaux, le personnel de santé est formé, les centres de santé sont rénovés et les hôpitaux sont équipés en matériel médical. Mais à quoi ces établissements servent-ils si la population — même lorsqu’elle est gravement malade — n’ose pas s’y rendre par peur de ne pas pouvoir payer la facture ? Dans nos pays partenaires, la grande majorité de la population n’a pas d’assurance maladie, ce qui fait du traitement médical un choix stratégique. Il faut choisir. Choisir par exemple entre acheter un cahier pour l’école ou faire contrôler ses dents suite à une douleur persistante. Une hospitalisation inattendue due à la malaria peut signifier qu’il n’y aura pas de repas lors de la prochaine cérémonie religieuse… Imaginez un instant que vous n’êtes pas très malade, mais que vous avez mal à la gorge. Iriez-vous réaliser un test PCR si cela vous coutait l’équivalent d’une semaine de salaire ?

En RD du Congo, il y a des femmes et leur nouveau-né qui sont « coincés » dans un centre de santé ou un hôpital pendant plusieurs semaines parce qu’elles n’ont pas les moyens de payer la facture liée à l’accouchement. Elles ne sont pas autorisées à quitter l’hôpital tant que leur dette est impayée.

Le gouvernement doit assumer ses responsabilités

L’assurance maladie (sous toutes ses formes : mutuelle de santé, fonds de solidarité, etc.) offre une solution. En effet, les personnes qui travaillent dans le secteur agricole ou dans l’économie informelle (en RD du Congo, ce chiffre s’élève à 80 % dans les villes et à plus de 90 % dans l’ensemble du pays) ont rarement accès au système de remboursement régulier, mais grâce à de petites contributions à une mutuelle de santé locale, elles peuvent maintenir leurs frais de santé à un niveau bas. Des initiatives que Memisa soutient volontiers.

Au Burundi, Nadège milite depuis longtemps pour les mutuelles de santé. Elle va de village en village pour informer les habitants. « À l’aide d’exemples, j’explique les avantages de s’affilier à une mutuelle de santé. Beaucoup de gens ne savent pas que cela va au-delà des soins dans un centre de santé. Les traitements à l’hôpital ou les opérations chirurgicales sont également pris en charge. En plus, une mutuelle de santé contribue également pour les funérailles, organise des réunions au cours desquelles les membres peuvent échanger des informations sur la protection sociale et fournit des informations sur diverses questions de santé telles que la COVID-19. »

Bien entendu, les soins de santé restent avant tout une responsabilité de l’État. Les fonds de solidarité ou les mutuelles de santé ne peuvent en aucun cas décharger les gouvernements de leur responsabilité. Ces fonds constituent un lien important entre le gouvernement et la population. Les mutuelles peuvent également faire pression sur les gouvernements pour que les soins de santé deviennent une priorité de l’agenda politique. Les initiatives de solidarité renforcent le tissu social et sensibilisent la population à son droit aux soins de santé. Et cela peut être organisé à une très petite échelle. À Katako Kombe (RD du Congo), par exemple, chaque femme enceinte qui accouche verse une petite contribution au « fonds de césarienne ». Si une femme enceinte présentant des complications doit subir une césarienne, l’opération est payée avec l’argent du fonds.

L’assurance maladie, un droit universel

Ce n’est pas le coronavirus lui-même qui tue les gens. Ce n’est pas le moustique qui est responsable des 409 000 décès dus au paludisme (OMS) chaque année. C’est le manque d’accès aux soins de santé. Il est grand temps de reconnaître l’assurance maladie comme un droit universel. Parce que lutter pour l’accès aux soins de santé, c’est lutter contre la pauvreté. Les soins de santé ne devraient pas seulement être disponibles, ils devraient être abordables.

« Je trouve toujours triste que les gens doivent vendre une partie de leur récolte pour payer leurs soins de santé. S’ils étaient membres d’une mutuelle de santé, ça ne serait pas nécessaire… », conclut Nadège.

Annelies Van Erp, collaboratrice Memisa

La version originale de cette opinion a été publiée sur MO*.

 

 

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